Juste à l’emplacement du pont enjambant la voie ferrée se dressait autrefois le moulin de La Bastille, à l’exemple du moulin des Douves visible à proximité en haut du coteau. Le site du moulin fut totalement détruit en 1846 lors de la réalisation de la ligne du chemin de fer car il se trouvait juste sur le tracé de la tranchée spectaculaire de 700 mètres de long à travers la roche de poudingue d’Ingrandes.
Il est probable que ce moulin avait été élevé en lieu et place de l’ancienne bastille depuis longtemps disparue (aucune archive connue), mais dont le nom du site a conservé la mémoire. Cette bastille devait être une petite fortification marquant une présence militaire bretonne aux abords de la « frontière » avec l’Anjou et la France. Cette frontière assez vague et étendue était appelée les « marches » de Bretagne ».
Plusieurs indices confortent l’hypothèse de cet emplacement sur le plan de l’ancien cadastre dressé avant la destruction du moulin :
– tout d’abord la forme quadrangulaire de la parcelle, formant un îlot d’une quinzaine de mètres de côté, curieusement ceinturée de chemins…
– la situation au débouché de la rue des « Douves » dont le prolongement bordait le sud et l’est de cette même parcelle ;
– enfin la position stratégique sur le haut du coteau en bordure de la « coulée » du ruisseau du Bois vert…

Les archives de la baronnie de Montrelais, des noms évocateurs conservés dans l’ancien cadastre et par certaines rues permettent d’imaginer le site au Moyen Age. Outre la bastille, il y avait un moulin à eau associé à un étang pour actionner la roue à aube par un canal de vidange : celui-ci était très probablement situé dans la coulée du ruisseau Bois Vert offrant des conditions idéales pour une retenue d’eau.
Sur l’ancien cadastre, une parcelle en bordure du port est désignée sous le nom de « curebourse » (littéralement qui « cure les bourses »), ce qui peut indiquer la perception de péages pour les marchandises transitant par le fleuve… A proximité, la ruelle de l’Audience rappelle l’existence d’un tribunal seigneurial. Ce tribunal s’était déplacé au 18ème siècle dans la maison en tuffeau au toit à 4 pentes juste en contre-bas (n° 3, rue de la Mairie).
Le site de la Bastille était donc un bastion avancé de la baronnie bretonne de Montrelais, en limite de frontière avec l’Anjou marquée plus en amont par la Pierre de Bretagne, un mégalithe imposant détruit sous la Révolution.